au bonheur des bilingues

quelques modules d’allemand pour s’entrainer à entendre et à écrire la langue

mais accessible aux autres avec un peu d’entrainement

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vendredi 29 mai

mathématiques

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français

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votre lecture

une flaque de larmes

J’aimais bien faire le trajet de l’école avec Emma.
Le matin, j’expédiais mon petit-déjeuner pour être au croisement avant elle. Parfois, maman disait : « Eh bien, en voilà une qu’est sacrément pressée d’aller à l’école ! » Alors je haussais les épaules en tournant la tête pour qu’elle me voie pas rougir, puis j’attrapais mon sac et je filais jusqu’au croisement, aussi vite que je pouvais. Au cas où elle arrive avant moi et qu’elle oublie de m’attendre. Même si c’est jamais arrivé.
Au croisement, il y avait un arbre. Je m’y adossais pour reprendre mon souffle. De là, je voyais la route que prenait Emma. Quand elle arrivait, je lui lançais : « Salut M ! ». Emma me répondait : « Ça boume, Howie ? ». Et on faisait ensemble le chemin jusqu’à l’école.

Emma avait lu tous les livres qu’on pouvait trouver par ici. Même ceux que les adultes disaient trop compliqués pour nous. Souvent, sur le trajet, elle me racontait une des centaines d’histoires qu’elle connaissait. Elle était capable d’expliquer tous les mystères de l’univers. Elle aurait pu frimer avec tout son savoir, mais c’était pas son genre. Elle expliquait les choses avec des mots simples, et souvent vous compreniez avant même qu’elle ait terminé.
Emma, c’était le savant le plus cool du monde, et moi, j’étais fière d’être son amie.

Ce jour-là, j’étais encore plus impatiente de la retrouver. Ce que j’avais à lui raconter, c’était incroyable. Je tournais en rond autour de l’arbre. J’arrêtais pas de surveiller la route.
Quand enfin Emma s’est pointée, j’ai bondi vers elle.

— Eh M, faut que je te raconte un truc ! J’ai pas idée de ce que ça peut être. J’en ai pas dormi, cette nuit. Peut-être tu vas croire que je suis folle. Ou que j’ai halluciné. Mais je sais ce que j’ai vu, et…

Elle s’est tournée vers moi et elle m’a dit en riant :

— Oublie pas de respirer, Howie. Ça va être compliqué de me raconter si tu respires pas.

Elle avait raison. J’ai respiré. Et j’ai commencé à lui raconter pendant que nous nous mettions en route.

— Je faisais mes devoirs dans ma chambre. La fenêtre ouverte. Il faisait super beau. À un moment, j’ai entendu comme des pleurs. C’était pas bien fort. Comme quelqu’un qui essaierait qu’on l’entende pas pleurer, mais qui serait trop triste pour s’arrêter. Ça venait de dehors…

J’avais toute l’attention d’Emma. Elle disait pas un mot. Elle hochait la tête et c’est tout.

— Je suis allée à la fenêtre, j’ai écouté attentivement, et là j’ai compris que ça venait de la haie. Je suis sortie, je me suis approchée sans faire de bruit et me suis accroupie pour regarder. Y avait quelque chose dans la haie, pas bien grand. À peine le temps de l’apercevoir, il avait filé sous les branches. Alors je l’ai suivi. À quatre pattes. En rampant, aussi. J’entendais les feuilles qui bougeaient, juste devant moi, et puis toujours les pleurs. Je l’apercevais par moments – petit, trapu, sombre – mais il disparaissait trop vite pour que je le voie bien. « Faut pas avoir peur », je lui ai dit, « je suis pas méchante », mais il continuait de fuir, piégé dans la haie, entre le mur qu’il pouvait pas traverser et le jardin où il osait pas s’aventurer. Au bout, je le savais, il allait se retrouver coincé.

Je me suis interrompue. Le temps de me demander une dernière fois si j’étais bien sûre de ce que j’avais vu, et surtout si j’étais prête à raconter ça à Emma. Elle m’a pas laissé le temps d’y réfléchir bien longtemps.

— Et alors, elle m’a relancée, tu l’as rattrapé ?
— Il s’est retrouvé coincé. Exactement comme j’avais prévu. Entre le mur et la cabane de jardin, au bout de la haie, avec moi qui arrivais derrière lui. Il s’est mis à pleurer encore plus fort. J’entendais ses sanglots comme je rampais vers lui. Ça m’a rendue encore plus curieuse… J’ai continué jusqu’à me retrouver devant lui. J’ai pas eu beaucoup de temps pour le voir, mais je risque pas de l’oublier ! Il était tout petit. Ramassé sur lui-même. Une peau brunâtre, toute plissée, deux fois trop grande pour lui. Et couverte de pustules. Ou de verrues, je sais pas. Un groin morveux, et puis ses yeux, avec des poches dessous et des larmes qui coulaient, comme un robinet resté ouvert. Ce qu’il était moche ! C’est pas possible d’être aussi moche ! Mais pas moche à faire peur, non. Plutôt moche à dégoûter.

Raconter l’histoire, c’était comme être à nouveau dans la haie. Ça m’a fait frissonner.

— Je pourrais jamais l’oublier, c’est sûr. Et puis d’un coup… D’un coup, il a fondu en larmes. Je veux dire vraiment fondu… Il est rien resté de lui, quoi ! Tellement il pleurait qu’à la place y avait plus qu’une flaque d’eau.

Emma et moi on est restées silencieuses.

— Je crois bien que je l’ai tué, j’ai murmuré. De sa façon à lui de mourir, quoi. C’est affreux. Je lui ai tellement fait peur que ça l’a tué.

À leur tour, mes yeux étaient pleins de larmes. J’avais pas envie qu’Emma me voie comme ça, alors j’ai regardé mes pieds.

— T’as pas pris de photo ? elle m’a demandé.
— J’y ai pas pensé, j’ai soupiré. Enfin si, mais trop tard. J’ai juste pris la flaque.

Je la lui ai montrée sur mon téléphone. Elle a froncé les sourcils. Puis elle a agrandi la photo, et pointé quelque chose, et a dit, pensive « Des larmes et des bulles… » Et puis elle a fait une recherche et, me montrant l’écran, a ajouté « C’est ça que tu as vu ? » J’ai pas pu me retenir de crier. C’était juste un dessin, mais c’était exactement ça. Aussi moche qu’en vrai.

— Alors c’est pas une légende… a dit Emma. J’ai lu un livre qui parle d’un tas de créatures imaginaires, du monde entier. Parmi elles, y en a une très timide et très laide, et si triste d’être aussi laide et seule qu’elle pleure tout le temps sur son sort. Il paraît qu’un jour, un chasseur l’a capturée et enfermée dans un sac, mais quand il a ouvert son sac, il y avait rien d’autre dedans que de l’eau. Des larmes et des bulles.

On s’était arrêtées à quelques mètres de l’école. Les autres nous saluaient, mais c’est à peine si on leur répondait.

— Et elle a un nom, cette créature ? j’ai demandé.
— Ouais, a répondu Emma. C’est un squonk.
— Un squonk, j’ai répété. Y avait un squonk dans ma haie, peut-être le seul au monde, et je l’ai tué.
— Non, a souri Emma, tu l’as pas tué. C’est sa façon de s’échapper, pas de mourir. Après, il a dû reprendre sa forme.
— Je préfère ça, j’ai dit, soulagée. En tout cas, c’est une sacrée découverte ! Tu te rends compte ? Il faut qu’on dise aux gens que c’est pas une légende !
— Je crois surtout qu’il faut le laisser en paix, Howie, m’a stoppée Emma. Imagine sa vie, si ça se sait.

J’ai réfléchi. Elle avait raison. Vu comme sont les gens, ils allaient chercher à le capturer. L’enfermer, l’étudier et sûrement le disséquer. C’était mieux de rien dire à personne. Y avait plein de bestioles dans le monde qui existeraient encore si on les avait prises pour des légendes, comme les dodos, ou peut-être même les licornes. Et puis, ça faisait un secret juste à nous deux, et ça me plaisait bien.

— Allez, j’ai dit, ça va bientôt sonner.

Et ensemble on a franchi le portail de l’école.

un peu d’allemand 

 

 

lundi 25 et mardi 26 mai

bonjour à tous pour cette fin du mois de mai 

vos fiches de travail à télécharger 

cliquez sur les dates 

lundi-25.05

Mardi-26.05

 

un peu de lecture avec Philibert le dragon 

 

Noah avançait en retenant son souffle. La nuit commençait à tomber et plongeait les champs qui bordaient la route dans l’obscurité. 
C’était la première fois de sa vie que Noah rentrait du collège alors qu’il faisait déjà sombre. La faute à ses parents qui avaient insisté pour qu’il révise son contrôle de maths de demain. 
Pour le moment, Noah ne se préoccupait pas le moins du monde de mathématiques. Il était bien plus attentif aux bruits qu’il entendait partout autour de lui : cris inconnus, chants d’oiseaux nocturnes, sifflement lugubre du vent dans les herbes… 
Noah n’avait jamais été très courageux. Alors l’immense chêne tordu, les branches qui ressemblaient à des griffes, les reflets de la lune dans le ruisseau, le dragon allongé dans les blés, ça lui fichait la frousse. 
Le dragon allongé dans les blés ? 
Noah s’arrêta brusquement, le souffle coupé, avec l’impression qu’on venait de lui remplir l’estomac de glaçons. Il risqua un coup d’œil sur le côté, en direction de l’énorme forme allongée dans le noir. 
Ce fut cet instant que choisit la créature pour bâiller, en dévoilant une impressionnante quantité de dents aiguisées. 
Noah hurla. 
— Non mais oh ! C’est quoi ce toucan ? Les nuisances sonores sont interdites pendant la sieste entre midi et dix-neuf heures, tout le monde le sait ! Si vous recommencez, j’appelle les… Oh, excuse-moi, humain. J’oublie que je ne suis plus chez moi.
— Je… Euh… Pardon… balbutia Noah stupéfait. Et euh… on dit « boucan », pas « toucan ».
Le dragon – plus de doute, c’en était un – posa sur le garçon un regard mauvais et Noah recula d’un pas, puis de deux. Et même d’un troisième, pour faire bonne mesure.
— Oh, ça va ! souffla finalement la bête en faisant jaillir une petite flamme de ses narines, qui illumina ses écailles d’une jolie couleur dorée. Je sais que je fais des fautes. Pas la peine d’en faire toute une passoire, petit humain ! 
Noah ne put retenir un sourire amusé. 
— Pourquoi est-ce que tu souris, toi ? fit le dragon d’une voix suspicieuse. Oh, je me suis encore trompé c’est ça ?
Noah acquiesça.
— Je crois que tu voulais dire « en faire toute une histoire ».
L’agacement de la créature élargit un peu plus le sourire de Noah. Il ne voulait pas se moquer, mais il y avait quelque chose de drôle à corriger les erreurs d’un monstre couvert d’écailles.
— Je n’y arriverai jamais, gémit le dragon. 
— Ce n’est pas si grave…
L’animal ailé renifla, faisant jaillir de ses naseaux une petite flammèche.
— Si, justement, c’est très grave ! Un dragon qui se trompe de mot à toutes les phrases, ce n’est pas très impressionnant. Tu sais, nous, les dragons, nous devons garder les trésors que l’on nous confie. Hélas ! Du fond de ma grotte, je lançais mes terribles tenaces aux voleurs, mais au lieu de fuir à toutes jambes, ils se mettaient à rire. Et quand je suis tressé, je fais encore plus de fautes. On m’a volé tout ce que je devais surveiller et mon roi m’a banni de mon royaume… Je crois que je ne verrai plus jamais mon pays. Tu sais, autour de ma grotte il y avait des forêts gigantesques et des arbres merveilleux, que je survolais parfois quand personne ne rôdait autour de mon trésor. Il y avait aussi des couchers de soleil incroyables et une cruche dont les abeilles produisaient un miel délicieux. Hélas, je crois que plus jamais je ne pourrai voler dans le miel et manger ce ciel.
Il y avait un tel désespoir dans sa voix que Noah ne sut quoi répondre. Mais la bête semblait vouloir alléger son cœur.
— Quel dragon fait rire les gens au lieu de leur faire peur, hein ? Je suis le plus inutile de tous les dragons ! Tous mes compagnons ont des surnoms comme « Le Redoutable », « L’Impitoyable », « Le Sanguinaire »… Mais moi ? Au mieux ce sera Philibert l’Incompétent, voilà ! 
L’ainsi nommé Philibert renifla une seconde fois. Noah lui aurait bien tapoté la patte pour l’apaiser, mais la vue des énormes griffes acérées le retint.
— Moi je te trouve plutôt bien, comme dragon, dit-il à la place. Enfin, je peux pas vraiment comparer… Mais j’ai eu très peur tout à l’heure quand je t’ai vu ! C’est un bon début, non ? Et puis, parfois, on est différent de ce que les gens attendent de nous. C’est pas grave, on fait autrement.
Devant l’air peu convaincu du dragon, il ajouta :
— Tu vois, moi je suis nul en mathématiques, par exemple. Alors je me rattrape sur le français.
Ce fut au tour du dragon de rire :
— Nul en mathématiques ? Comment on peut être nul en mathématiques ? Comment je ferais si je ne pouvais pas compter, additionner, sous terre, multiplier et diviser tout ce qu’il y a dans mon trésor pour vérifier que personne n’a rien volé ?
— Eh bien, sourit Noah, tu vois bien que tu n’es pas incompétent !
Une pensée traversa l’esprit du garçon.
— D’ailleurs, si tu acceptais de me filer un coup de patte pour mon contrôle de demain… Je pourrai peut-être t’aider à convaincre ton roi de t’accepter à nouveau dans ton royaume. En t’écrivant un discours par exemple, et en t’aidant à l’apprendre sans faire de fautes.
Le dragon pencha la tête, intrigué, puis ses babines s’étirèrent en un sourire rempli de crocs.
— Par mes regrettés orchestres, en voilà une bonne idée !
« Tes ancêtres », pensa Noah. « Pas tes orchestres ». Mais Philibert affichait un air si joyeux qu’il n’eut pas envie de corriger son erreur. Au fond, ce n’était pas très grave.
— Dans ce cas, allons chez moi pour travailler, proposa-t-il.
Philibert se leva en s’étirant, joyeux.
Dehors, la nuit avait recouvert les champs d’un grand manteau noir, mais avec Philibert à ses côtés, Noah n’avait plus peur de rien – même plus du contrôle de maths du lendemain.
Sur le trajet qui les conduisait chez lui, Noah se demanda seulement comment il allait expliquer à son père et à sa mère qu’un dragon passerait la soirée chez eux.
Il cessa bien vite de s’inquiéter. S’il se sentait capable de rédiger un discours pour convaincre le roi des dragons de laisser Philibert revenir auprès des siens, il pouvait tout aussi bien convaincre ses parents d’accepter son ami pour la nuit !
Et si vraiment ils refusaient, une petite démonstration des capacités en calcul mental du dragon les ferait sans doute changer d’avis…

de petits exercices pour s’entrainer 

connais tu les personnages de Tintin ?

 

un peu de sciences 

 

l’allemand si tu n’es pas sur duolingo

Sauras tu trouver définir les différentes élections ?

travail cm2 du 18 et 19 mai

lecture : Augustin et la baleine siffleuse

Augustin était un garçon très malin. À neuf ans, il avait déjà inventé la machine à dégonfler les pastèques, le stylo qui écrit tout seul et le sac à dos pour pigeons voyageurs.
Un matin, alors qu’Augustin était occupé à dessiner à son bureau, Eugénie, sa maman déboula dans sa chambre :
— Augustin, arrête tes gribouillages, prends tes tongs et tes lunettes, nous allons pique-niquer à la plage !
Augustin fronça les sourcils et gronda :
— D’abord, ce ne sont pas des gribouillages, ce sont les plans ultra-secrets de ma nouvelle fusée intergalactique, et ensuite, j’ai pas envie de sortir !
— Mais enfin, Augustin, c’est dimanche, il fait un temps splendide, il faut t’aérer un peu la tête !
Elle s’approcha et passa sa main dans ses cheveux :
— Sinon, à force de trop réfléchir, ça va fumer là-dedans, et puis ça va finir par exploser ! En plus, j’ai préparé ton dessert préféré.
— Le cake de carottes au gingembre ? demanda Augustin en se mettant tout à coup à saliver.
— Avec une pointe de cannelle, comme tu aimes, compléta Eugénie. Allez, en route, on va se régaler !
Arrivé sur la plage avec toute sa famille, Augustin s’installa confortablement à l’ombre du grand parasol. Il commença par s’attaquer aux chips à l’oignon qu’il engloutit en un temps record.
— Ne mange pas si vite, prévint Eugénie, c’est mauvais pour la digestion !
— Mouich mais ché tellement bon ! répondit Augustin la bouche pleine.
Puis il attrapa un œuf dur et le saupoudra délicatement d’un peu de sel et de poivre. Mais soudain, Augustin se figea telle une statue avec la poivrière dans la main : un bruit étrange s’approchait de la plage, comme le bruit sourd d’une sirène dans un tunnel. 
Le bruit semblait venir du large et se rapprochait à la vitesse d’un mammouth affamé lancé au triple galop.
Habitué à réfléchir en quatrième vitesse, Augustin ne mit pas longtemps à comprendre. Il écarquilla les yeux et s’écria :
— Aaaaaaaah !!! C’est la baleine siffleuse ! Elle va nous avaler tout cr…
Augustin n’eut même pas le temps de terminer sa phrase qu’une gigantesque baleine était sortie de l’eau et avait gobé Augustin et toute sa famille, avant de repartir comme une fusée dans les profondeurs de l’océan.
— Bouhouuuu, il fait tout noir là-dedans ! lança Agathe, la petite sœur d’Augustin. Pouah ! Et ça sent mauvais ! Mais où est-ce qu’on est ?
— Dans le ventre de la baleine siffleuse ! répondit Augustin, qui tenait toujours la poivrière dans sa main.
— Mais, mais… mais, ce n’est pas possible ! hurla Eugénie si fort que tout l’estomac de la baleine se mit à trembler. Augustin, toi qui as toujours des idées géniales, c’est le moment de celle qui nous fera sortir d’ici !
— Mais euh…. je sais pas, moi… Faut je réfléchisse… C’est que je n’ai pas encore fini les plans de ma fusée intergalactique… Il me manque le propulseur à essence de mayonnaise. Ah ! si seulement j’avais pris mon lanceur de balles en gélatine, ça aurait pu servir… Voyons, réfléchissons…
— Oui, eh bien réfléchis vite ! gronda Agathe.
— C’est que ce n’est pas facile dans le noir ! se lamenta Augustin en remuant la poivrière qu’il tenait toujours dans sa main.
Le ventre de la baleine se mit à remuer. Et le regard d’Augustin s’illumina d’un coup :
— Mais oui ! Le poivre ! C’est ça la solution ! Le poivre, ça irrite la gorge, ça pique le nez, et ça fait… éternuer ! Attention ! lança Augustin, préparez-vous pour le vol plané du siècle !
Le garçon grimpa à tâtons jusqu’à la bouche de la baleine, vida le poivre qui lui restait le plus près possible des deux tunnels qui menaient à son nez et redescendit en se laissant glisser à toute vitesse.
La baleine ne tarda pas à s’agiter, inspira plusieurs fois par à-coups, et finit par éternuer aussi fort qu’un troupeau d’éléphants enrhumés.
Augustin fut projeté loin avec sa petite sœur et ses parents et atterrit sur la plage, le nez dans le sable, complètement sonné, mais libre !
– Bravo Augustin, s’écria Eugénie en se relevant pour aller l’embrasser. Tu as réussi ! Tu vois, les idées les plus géniales sont souvent les plus simples ! Dorénavant, nous sortirons toujours avec un peu de poivre dans la poche, on ne sait jamais !

Exercices de français

exercices de mathématiques

7 mai 2020

Merci à  tous si ce n’est pas fait de remplir le sondage sur la page d’accueil du site de l’école 

lorsque l’école sera ouverte : les cours vont continuer sur cette plateforme pour ceux qui restent à la maison 

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la lecture du jour : Grand-Mère s’en va-t-en guerre

Grand-mère a été une petite fille, elle aussi. Ça me fait toujours rire quand elle me dit ça. Petite fille ? En short, avec des tongs et des T-shirts ? Noooon ! Non. Elle est honnête Grand-mère, elle ne raconte pas n’importe quoi (pas de balivernes, c’est son mot à elle). Quand elle était petite, c’était la guerre. La vraie. Dans son pays ! On n’avait pas encore inventé les tongs. Mais les tanks et les fusils et les bombes, oui. Tout cela existait depuis très longtemps. Et la méchanceté aussi.

J’ai peur et en même temps, j’aime bien quand elle me raconte des histoires de ce temps-là. Grand-mère, qui vivait loin dans une ville du Nord, avait été obligée de traverser toute la France avec sa famille, pour fuir les bombardements et éviter la mort. Elle s’était réfugiée dans un village du Sud ; cela s’appelait la « zone libre » parce que les soldats ennemis n’y étaient pas encore arrivés. Les gens du village avaient prêté des maisons, des meubles. Mais Grand-mère n’était pas très heureuse ; tout lui manquait : son papa – qui était prisonnier de guerre – son école, ses affaires qu’elle avait laissées dans sa vraie maison.

Malgré tout, les voisins de Grand-mère, Monsieur et Madame V., étaient très gentils. Ils étaient vieux. C’est pour cela que Monsieur V. n’était pas parti faire la guerre. Grand-mère dit qu’il « n’avait pas été mobilisé ». C’était pourtant un homme très courageux. Il était résistant. Mais ça, Grand-mère ne l’a su que beaucoup plus tard, quand la guerre a été finie.

Et puis, les soldats ennemis ont fini par arriver. Ils se sont installés partout. Il n’y avait plus de zone libre. Ils surveillaient tout, on ne pouvait pas se déplacer comme on voulait, où on voulait, quand on voulait. À tout moment, on risquait de se faire contrôler. Il fallait montrer ses papiers, dire où on allait, pourquoi on y allait. C’était très compliqué et parfois dangereux.

Un soir, quelqu’un a frappé à la porte, fort, très très fort. Dehors, il faisait nuit noire. Dans la rue, à cette époque-là, il n’y avait pas de lampadaires, même pas la plus petite lanterne. Et ce soir-là, ni lune, ni étoiles non plus. La maman de Grand-mère va ouvrir. Un soldat immense masque presque toute l’ouverture. Dans la pénombre, on aperçoit sa voiture stationnée juste devant la maison, avec un autre homme au volant.

Grand-mère, blottie dans les jambes de sa maman, a presque le nez sur l’arme du soldat. Elle a envie de pleurer, de crier. Sa maman lui prend la main et la serre fort. Grand-mère n’est pas vraiment rassurée, mais elle comprend qu’il faut se taire. Sa maman lui a très souvent expliqué ces choses et lui a enseigné ce qu’il faudrait faire, au cas où les soldats viendraient à la maison :
— Ne parle pas, ne pleure pas. Si je te serre la main très fort et te demande d’aller te coucher, vite disparais ! Mais au lieu d’aller dans ta chambre, passe par la petite porte de derrière sans faire de bruit, pendant que je continue à parler avec les soldats. Fais vite, très vite ! Tu frappes trois coups – pas plus, trois coups, c’est tout ! – à la porte de la cuisine de Monsieur et Madame V. Tu dis « Ils sont là » et tu reviens en courant.

Le soldat a un drôle d’accent ; quand il parle, on dirait qu’il crache des clous et des marteaux.
— Va te coucher ma grande ! ordonne sa maman.
Grand-mère file. Elle a le temps d’entendre sa mère répondre très calmement au soldat :
— Pouvez-vous répéter ? Je n’ai pas bien compris.
Pourvu qu’il ne s’énerve pas, pourvu qu’il ne frappe pas, pourvu… Mais il n’y a pas de temps à perdre. Elle réfléchira plus tard.

La petite porte est bien huilée, elle ne grince pas. Grand-mère est dans la nuit, elle avance le plus vite possible, à l’aveuglette dans l’herbe et la terre du jardin ; elle piétine les semis, tant pis. Heureusement, il n’y a pas de clôture qui sépare les deux propriétés. Enfin, le mur de la maison des voisins : dans le noir, Grand-mère se guide en tâtonnant sur les pierres. Voici la porte de la cuisine. On aperçoit un minuscule rai de lumière. Vite, vite, il faut frapper sans hésiter. Assez fort pour donner l’alerte mais sans être entendue par les soldats. Grand-mère respire à fond et toc, toc, toc. Tout de suite Monsieur V. entrouvre.
— Ils sont là ! dit Grand-mère dans un souffle et elle repart en vitesse, mais discrètement. Elle piétine une seconde fois les plates-bandes du jardin, se faufile par la porte arrière de la maison.

Elle trouve sa maman calmement installée à la table de la cuisine, en train de repriser une chaussette de laine, dans la douce lumière de l’abat-jour. Grand-mère a l’impression de se réveiller d’un cauchemar. Toutes les choses sont à leur place. Sa maman lui sourit :
— As-tu fait comme je t’avais expliqué ?
— Oui maman.
— Très bien, va te coucher.
Elles s’embrassent fort, comme si elles ne s’étaient pas vues depuis longtemps.

Le lendemain matin, en partant à l’école, Grand-mère a croisé Monsieur V. Il avait l’air encore plus vieux et fatigué que d’habitude, mais il lui a fait un grand sourire. À midi, un énorme panier de pommes trônait dans la cuisine. Un cadeau des voisins.

Quand la guerre a été finie, Grand-mère a appris que grâce à elle et à sa maman, Monsieur V. avait pu se cacher avant que les soldats n’arrivent chez lui. Le parachutiste anglais, qui était dans la cave, avait eu également le temps de s’enfuir. La maman de Grand-mère avait gagné de précieuses minutes en discutant avec le soldat pendant que Grand-mère courait de toutes ses petites jambes pour alerter les voisins.

Grand-mère et sa maman ont reçu chacune une médaille pour ce qu’elles ont fait. Grand-mère m’a promis de me donner la sienne. Elle ne la porte jamais. Cela lui rappelle trop sa peur cette nuit-là et pendant tout le temps de la guerre. Ce n’était pas facile d’être une petite fille à cette époque-là.

jeudi 30 avril

bonjour à tous et bon retour avec nous 

Duolingo : continuez vos efforts et bravo pour vos progrès 

Mathématiques :

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Français 

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Lecture : La tortue téléportée

Tout avait commencé alors qu’Aria promenait Sherlock le long de la rue des Mauvais Vents.
C’était les vacances. Pour faire plaisir à Maman, Aria avait refermé à regret son livre – il ne restait que six statuettes après que Rogers ait été retrouvé mort tandis qu’il coupait du bois et Aria n’était pas convaincue que Miss Brent soit la coupable – pour sortir Sherlock.

— Chérie, avait dit Maman sans lever les yeux de sa tablette, tu ne peux pas passer toutes tes journées plongée dans tes livres, la vraie vie est dehors tu sais. Sors un peu, ça te fera du bien. Fais-le au moins pour le chien, il adore ça.

Les regards d’Aria et de Sherlock s’étaient croisés, tous deux avaient soupiré avant de se lever pour se diriger vers la porte d’un pas traînant. Peine perdue, Maman souriait en faisant défiler Dieu sait quoi sur son écran et ne captait rien des manifestations de mauvaise grâce des deux expulsés.
Au moins il faisait beau. Le vent qui soufflait encore quelques minutes plus tôt était tombé après avoir chassé les derniers nuages. Il n’y avait pas grand monde dans les rues, rien qui puisse détourner les pensées d’Aria de Dix petits nègres. Qui serait la cinquième victime ? Qui était l’assassin ? Était-ce l’un des six survivants ?

Arrivée au pied de la montée des Vignes, Aria remarqua un skateboard abandonné sur la chaussée, près du trottoir. Elle reconnut celui de Pedro, un garçon qui était dans la même classe qu’elle. La planche de Pedro était rouge et une tête stylisée de taureau y était peinte en noir. On ne pouvait la confondre avec aucune autre. Aria regarda autour d’elle, mais il n’y avait aucune trace de son ami. Pas plus dans la rue que dans le jardin public tout près duquel Sherlock et elle se trouvaient. Pedro n’était pas du genre à laisser traîner ses affaires, et ce skate moins que toute autre. Le père de Pedro avait parcouru les trottoirs de Barcelone sur cette planche lorsqu’il avait son âge. Il l’avait offerte à son fils deux ans plus tôt, lorsqu’il était rentré au pays, après le divorce.

— Je sais, dit Aria en regardant Sherlock, cette planche n’a aucune raison de se trouver ici si Pedro n’y est pas !

Le chien approuva d’un battement de queue.
Aria tourna la tête vers la montée des Vignes. Pedro habitait une maison tout en haut, avec sa mère et son jeune frère. La jeune fille ramassa la planche et, Sherlock sur ses talons, gravit la côte.
C’était le branle-bas le combat dans le jardin des Nuñez. Le frère de Pedro tournait à quatre pattes autour de la balançoire, écartant les herbes hautes et y enfouissant parfois la tête, tandis qu’une dame âgée – sa grand-mère ? – jetait l’un après l’autre au milieu du jardin les coussins empilés sous l’auvent. Ici non plus, aucune trace de Pedro.

— Excusez-moi… hasarda Aria, par-dessus la haie basse, grillagée, qui fermait le jardin.

Personne ne sembla l’entendre.

— Excusez-moi, répéta-t-elle plus fort, est-ce que Pedro est là ?

Elle ne put retenir un cri quand le garçon surgit de derrière la haie.

— Eh, salut Aria, dit-il en brossant de la main son jean. Désolé de t’avoir fait peur. J’étais dans la haie.

Il portait un tee-shirt trop grand à l’effigie d’un vieux groupe de rock et un bonnet en laine dont dépassaient des mèches de ses longs cheveux noirs.
Puis, avisant le skateboard qu’Aria serrait contre elle, il dit :

— On dirait… Mais c’est mon skate ! Qu’est-ce que…
— Je l’ai trouvé en bas, vers le jardin public. Il était dans la rue.

Pedro regarda vers la maison.

— Je l’avais pourtant rentré.
— T’es sûr que tu l’as pas laissé sur le trottoir ? demanda Aria. Sinon comment aurait-il roulé jusqu’en bas ?
— Non ! Jamais de la vie ! C’est le skate de mon père, quand même. Tu sais bien ! Ou alors… ajouta-t-il en se tournant vers son frère qui, toujours à quatre pattes, élargissait les cercles qu’il traçait autour de la balançoire. Non, il sait qu’il n’a pas le droit d’y toucher. Il s’est suffisamment fait disputer la dernière fois. En tout cas, merci de l’avoir retrouvé !

Aria lui tendit la planche par-dessus la haie.

— Il se passe quoi, ici ? demanda-t-elle en regardant le jardin, étonnée par ce qu’elle y voyait.

Le frère de Pedro était maintenant hissé sur la balançoire, débout, et à la manière d’une vigie il examinait le jardin depuis son poste d’observation, la main en visière, tandis que la grand-mère – Aria se souvenait maintenant qu’elle était venue d’Espagne pour passer les vacances avec sa fille et ses petits-enfants – disparaissait derrière le tas de bois sous l’auvent.

— C’est la tortue de Juan, répondit Pedro. On sait pas où elle est. C’est pas son genre de disparaître. C’est pas une aventurière.
— Pétunia, c’est ça ?
— Euh… Oui. On cherche partout mais on ne la retrouve pas.
— Je peux vous donner un coup de main ? proposa Aria.

Sherlock hocha la tête de satisfaction et Pedro leur ouvrit le portillon.
Après quelques minutes de vaines recherches, Sherlock vint se planter devant Aria.

— Il faut en revenir aux faits, lui souffla-t-il, avec ce ton agacé qu’il prenait toujours dans ces cas-là, et à leur chronologie. Combien d’affaires mystérieuses sont-elles résolues grâce à un examen froid et logique des faits ?

Dieu merci, personne d’autre qu’Aria n’entendait les conseils que lui adressait son chien.

— Ça va, rétorqua-t-elle sans desserrer les dents et en le regardant de haut. J’allais le faire. Qu’est-ce que tu crois ?

D’un battement de queue las, Sherlock lui fit comprendre qu’il n’était pas dupe mais qu’il ne souhaitait pas en débattre davantage.

— Bon, lança Aria, faut se rendre à l’évidence : si la tortue n’est pas dans le jardin, c’est qu’elle est ailleurs.
— Quelqu’un l’a volée, gémit Juan. C’est les Chinois. Grégoire m’a dit que les Chinois mangent de la soupe de tortue. Il a vu ça dans un restaurant. C’est un coup des Chinois, c’est sûr !
— Quels Chinois ? répliqua Pedro, agacé. Où as-tu vu des Chinois, par ici ?
— Ben, et ceux de l’autre côté de la rue ?
— Yoko ? Mais elle est japonaise, Yoko, pas chinoise !
— Alors des sushis à la tortue, peut-être ?
— On ne s’emballe pas ! coupa Aria. La dernière fois que quelqu’un a vu Pétunia, c’était quand ?

Pedro se tourna vers Juan. Celui-ci haussa les épaules et répondit :

— C’était quand je lui ai apporté une feuille de salade, pour son goûter. Vers quatre heures.

Aria hocha la tête, d’un air pensif.

— Et vous avez constaté sa disparition quand ?
— C’est ma grand-mère qui s’en est rendu compte, dit Pedro. Il y a un quart d’heure, à peu près. C’est bien ça, Abuelita ?
— Si, répondit la grand-mère en émergeant de derrière le tas de bois de chauffage, sous l’auvent, la frontale avec laquelle elle explorait ce coin sombre encore allumée. Quince minutos.
— Ok, dit Aria en jetant un coup d’œil vers Sherlock.

Le chien faisait mine d’observer un papillon, la tête penchée sur le côté. Il tirait la langue à la manière d’un chien ordinaire, ce qui lui donnait un air inoffensif. Mais Aria n’était pas dupe. Sherlock ne perdait pas une miette de ce qui se disait. Il attendait simplement le moment propice pour l’humilier, en résolvant cette disparition avant elle. Elle ne devait pas lui laisser l’initiative.

— Ça laisse à peine une demi-heure entre les deux observations, dit-elle en regardant sa montre. Où était Pétunia quand tu lui as apporté son goûter ? ajouta-t-elle en se tournant vers Juan.
— Pourquoi tu l’appelles Pétunia ? lui demanda le jeune garçon en fronçant les sourcils. Elle s’appelle pas Pétunia, ma tortue ! C’est pas une fleur. Son nom c’est Pequeña.

Aria se tourna, vers Pedro, interrogatrice.
Son ami hocha gravement la tête.

— J’ai pas osé te reprendre, Aria. Je voulais pas que tu te vexes.

Il sembla à Aria que Sherlock ricanait, mais le mieux était de l’ignorer.

— D’accord, dit-elle. Pequeña. Elle était où, Pequeña ?

Juan pointa du doigt le petit bassin qui se trouvait près du mur, entre deux rosiers.

— D’accord, dit à nouveau Aria.

Puis, se tournant vers la cour goudronnée qui succédait au jardin et descendait légèrement vers la porte donnant sur la rue, close.

— Et le portillon était fermé ?
— Oui, comme toujours, répondit Pedro. On le laisse jamais ouvert. À cause de la tortue, justement.
— Le portillon était fermé, et le skateboard était à l’intérieur, c’est bien ça ?
— Ben… oui.

La voix de Pedro était soudain moins assurée et il se tourna vers son frère.

— La porte était fermée quand Abuelita a dit qu’elle ne trouvait pas la tortue, se dépêcha de dire Juan. Elle était fermée, je le jure.

Sa voix tremblait.

— Oui mais, un peu avant qu’elle s’en aperçoive ? insista Aria.
— Juan ? demanda la grand-mère. Dime la verdad.

Le garçon se mit à pleurer.

— Elle était pas dans la rue quand j’ai fermé la porte, parvint-il à articuler entre les larmes. J’ai regardé. Pequeña va pas assez vite pour aller plus loin que je pouvais voir. Ça faisait pas plus de dix minutes que je lui avais donné sa feuille de salade quand j’ai fermé la porte. Elle était pas dans la rue. Alors c’est qu’elle était forcément dans le jardin.
— Compte tenu du fait qu’une tortue se déplace à deux cent cinquante mètres à l’heure, en dix minutes elle peut parcourir une quarantaine de mètres, environ, dit Sherlock en baillant. En supposant qu’elle se soit mise en marche sans prendre le temps de manger son goûter, qu’elle ne se soit pas arrêtée une seconde, et qu’elle soit allée en ligne droite, elle aurait été, au pire au milieu de la rue. Le gamin n’aurait pas pu la rater. Sauf…

Aria jeta un regard inquiet autour d’elle. Comme toujours, elle était la seule à avoir entendu la pédante leçon de son chien. Elle fronça les sourcils en direction de Sherlock et celui-ci se dirigea vers le portillon.

— Suivez-moi, dit Aria en dépassant son chien à grandes enjambées.

Elle ouvrit le portillon et descendit la montée des Vignes, suivie de la famille Nuñez et de Sherlock.

Revenue à la rue des Mauvais Vents, elle regarda le sol, puis se tourna vers la montée par laquelle ils étaient arrivés, les autres formant un demi-cercle autour d’elle. La grand-mère avec sa frontale allumée, Juan qui continuait de pleurer doucement, se disant sans doute que les larmes le protégeaient d’une punition, et Pedro, son skateboard toujours sous le bras.

Suivant des yeux une trajectoire qui descendait depuis la maison des Nuñez jusqu’au point où ils se trouvaient, Aria dit à Pedro :

— C’est là que j’ai trouvé ton skate.

À son tour Pedro regarda vers sa maison puis, prenant sa planche entre ses mains, il secoua la tête.

— Pourtant, murmura-t-il, je l’ai rentrée, j’en suis sûr. Je me revois le faire.
— Ce que les humains sont lents, marmonna Sherlock. Faut pas s’étonner que vous ne soyez pas capables de régler les problèmes de cette planète si vous n’êtes même pas capables d’additionner deux plus deux !

Aria se retint de renvoyer le chien à la maison à coups de pied dans les fesses.
Juan se mit à pleurer plus fort, attirant l’attention bien malgré lui.

— Pardon, pardon, pardon ! implora le jeune garçon.
— Bon sang, Juan, cria Pedro, tu m’avais promis…
— Ne lui en veux pas trop, Pedro, dit doucement Aria. Après tout, c’est aussi le skate de son père. Il a eu envie d’en faire un peu dans la rue. Mets-toi à sa place.
— Mais pourquoi l’a-t-il laissé ici ? Quelqu’un aurait pu le voler !
— Je l’ai pas laissé ici ! se défendit Juan, entre deux sanglots. Je suis juste resté devant la maison. J’en ai vraiment pas fait longtemps. Je suis vite rentré. Et j’ai oublié de fermer le portillon…
— Et dans ta précipitation, compléta Aria, tu as laissé le skate dans la cour, devant la maison, c’est ça.

Le jeune garçon hocha vigoureusement la tête en s’essuyant les yeux. Sa grand-mère lui tendit un mouchoir et l’attira contre elle pour l’apaiser.

— Ça ne nous dit pas comment mon skate s’est retrouvé ici, dit Pedro. Ni où est Pequeña.

Aria se tourna vers le jardin public, qui faisait face à la descente, et dit :

— À mon avis, elle n’est pas loin d’ici… !

D’un jappement bref, Sherlock confirma. Il était planté devant un massif à quelques mètres d’eux et remuait vigoureusement la queue.
Juan se précipita vers le chien. Quelques secondes plus tard, il émergeait d’entre deux orangers du Mexique couverts de petites fleurs blanches, la tortue entre les mains.

— Comment tu as deviné ? demanda-t-il, admiratif, en dévisageant Aria.

Puis, en regardant vers sa maison, si loin qu’on ne pouvait la voir, il ajouta, songeur :

— Et comment Pequeña a-t-elle fait pour arriver jusque-là, aussi vite ? Vous croyez qu’elle s’est téléportée ?

Aria jeta un rapide coup d’œil vers Sherlock.

— Élémentaire, dit-elle. Ni téléportation, ni magie. Seulement la gravité.

Elle désigna du menton le skateboard que Pedro tenait sous son bras.

— Tu as dû laisser le skate contre la bordure qui sépare le jardin de la cour. Ta tortue est montée sur le skateboard de ton frère, par hasard, et sous son poids il s’est mis à rouler et a suivi la pente de la cour, franchi le portillon ouvert, puis dévalé la rue. Arrivé en bas, il a buté contre le trottoir et Pequeña a été projetée dans les airs pour atterrir dans ces massifs.
— Ouah, dit Juan, en serrant plus fort sa tortue contre lui et en embrassant le sommet de sa petite tête.
— Une vidéo de Pequeña qui descend la montée des Vignes sur un skate… murmura Pedro, rêveur, en regardant la tortue dans les bras de son frère. Vous imaginez le nombre de vues que ça ferait sur YouTube ?